dimanche 7 février 2010

Doux enlacements des jours heureux


Ilham Moussaïd

J'étais partie pour vous parler de mon indignation provoquée par la candidature d'une militante NPA voilée, Ilham Moussaïd, pour les régionales.
Si même les gauchistes se mettent à transiger sur la laïcité pour racoler des voix, où va t on ?
C'est une erreur, à mon avis, de penser que tout anticapitaliste peut être un allié objectif, tant qu'il lutte contre le Grand Satan.
Les intégristes de tous poils n'ont jamais été anticapitalistes.
Ca se saurait.
Ceux qui trouvent normal, voire prônent, le port du voile pour les femmes, sont anticapitaliste tant que ça n'est pas leur capitalisme qui domine.
C'est une erreur du NPA, mais plus que ça.
Je me sens trahie, trahie qu'une femme voilée puisse représenter le gauchisme.
Déjà qu'on n'a plus de gauche traditionnelle ...

Manif NPA à Copenhague

Je précise tout de même que Martine Aubry venant donner la leçon au "petit facteur" n'arrange pas mes nausées.
Parce que comme championne de la laïcité, elle se pose là : opposition à la loi interdisant les signes religieux ostensibles à l'école, piscine à créneaux horaires pour les femmes voilées, "accompagnement positif" de la construction de l'Institut Privé musulman, liste électorale de synthèse avec le doyen de l'Institut Catholique, création de la Fondation Face, la bonne conscience chrétienne des grands patrons, et autres prises de positions, montrant que le NPA est loin d'inaugurer la drague de l'électorat religieux.

Avec un président qui affirme que le curé est meilleur éducateur que l'instituteur, on n'est pas sorti de l'auberge laïque.

Mais il y a autre chose.

Alors que je parlais avec un ami de la façon de faire le café, je lui racontais comment mon père m'avait appris à le faire juste pour lui.
Il fallait faire chauffer de l'eau, dans une casserole, et arrêter le feu juste à l'apparition des petites bulles.
Une espèce de surtasse en inox était posée sur la tasse. Au centre, il y avait l'axe autour duquel on vissait un couvercle qui venait compresser le café moulu.
Tout l'art consistait à visser en tassant juste comme il faut le café, pour ne pas qu'il soit amer, ni, pire, du jus de chaussette.

Sculpture de bois à l'entrée d'un mas de Petite Camargue


Des souvenirs en appelant d'autres, d'un seul coup m'est revenu celui de mes parents, au milieu de la cuisine, d'un jaune et d'un orange éblouissants, s'enlaçant.
Et nous, mon frère et moi, petits, venant réclamer notre part d'étreinte, inclus dans le cercle, et la chanson binaire, deux notes hunnnnn hunnnnn, la première plus haute que la deuxième, émanant du haut de cette tour de chair, mélopée qui berce, mélopée de l'amour familial.

Et depuis, cette pensée, du bonheur que l'on a eut, de la chance que l'on a eut, d'avoir ce bonheur là.

La danse de Matisse

7 commentaires:

Nicolas Jégou a dit…

D'accord pour le NPA. Pour le café, je ne sais pas.

mtislav a dit…

Parce qu'elle porte un voile, elle est forcément intégriste ? La laïcité impose-t-elle de pas de ne pas pratiquer une religion ? Sonia Gandhi porte un foulard à l'occasion, la mariée qui sort de la mairie aussi... Il y a une manière de marquer un attachement culturel qui n'a parfois pas grand chose à voir avec la libération de la femme ou même la religion. Je me pose la question en tout cas...

Audine a dit…

Mtislav : non mais l'inverse est vrai. Les intégristes imposent le voile.
La laïcité n'impose pas de ne pas pratiquer de religion à quiconque : il s'agit juste de ne pas faire sortir la religion de la sphère privée pour s'en servir dans la sphère publique. Ce qui se fait lorsque des constructions religieuses sont approuvées voire financées par les élus, et à mon avis, ce qui se fait aussi quand une candidate se présente en foulard.
Tu exagères avec ton exemple de mariée :)
Attachement culturel ... il a bon dos. Ce sont des manifestations ostentatoires de pratiques religieuses. Ce dont tout le monde devrait se foutre en ce qui concerne la politique.

A l'horizon : tous dans un camp religieux reconnu ou dans des sectes ...

Audine a dit…

(au fait, ça n'est pas toi qui a une rubrique avec ce titre superbe - que je te jalouse - "décroissance de l'intime" ? :) )

Dorham a dit…

Ben à vrai dire, je ne suis pas un grand fan de l'ex LCR et de Besancenot, certaines causes ou pseudo-causes vous font de drôles de compagnons de lit.

Cela dit, j'ai quand même beaucoup de mal avec cette notion, cette distinction privé/public, parce que je n'ai pas encore trouvé la recette pour scinder à ce point mon existence.

Je crois que c'est facile à dire pour un non-pratiquant. Pour un pratiquant, cela confine à la schizophrénie, parce la pratique d'une religion conditionne obligatoirement notre comportement social et nos positions. Nos rapports avec les autres.

Maintenant, les signes, c'est autre chose, je suis choqué de la même façon quand des supporters de foot se baladent avec des drapeaux nationaux et chantent des hymnes dans les stades... Quand le sentiment d'appartenance vous sépare des autres, c'est à cet instant que se pose le problème de la cohésion sociale. C'est de cela qu'il faut se prémunir.

Pour finir, j'en viens au meilleur, à la fin de ton texte : j'espère que ces heureuses réminiscences vont s'étendre bien au-delà de ce que tu espères ;)

Audine a dit…

Dorham : oui je suis d'accord avec toi, on ne peut pas séparer dans sa tête ses croyances et ses idées politiques. Ma réaction concerne l'affichage public : le foulard dans ce cas là est le drapeau. Et même dans le fond, pour moi c'est pire, puisqu'il est un signe de soumission (au moins à un Dieu sinon à un homme ...).
J'ai la tentation permanente de l'extrême gauche, je ne supporte plus la gauche bobo, caviar, moraliste, opportuniste, et traitre au peuple. Ca ne s'arrange pas en vieillissant, en plus !
Mais là, j'avoue que je ne sais plus du tout vers qui tourner les regards, tant les représentants et leurs actes me paraissent affligeants.
Peut on, comme le dit avec humour ma mère, pour se mettre dans le contexte de cette discussion, s'en remettre à la Grâce de Dieu ? :)

Dorham a dit…

"Mais là, j'avoue que je ne sais plus du tout vers qui tourner les regards, tant les représentants et leurs actes me paraissent affligeants"

Pareille désespérance...